Gambit du Roi

https://en.wikipedia.org/wiki/King%27s_Gambit

 

 Le Gambit du Roi débute par les coups :

 

1.e4 e5

2.f4


gambit roi 1

Les blancs offrent un pion pour déloger le pion e noir du centre. Si les noirs acceptent le gambit, les blancs disposent de deux grands plans. Le premier consiste à jouer d4 et Fxf4,  qui permet de regagner le pion sacrifié et d'exercer une domination sur le centre. L'autre alternative est de jouer Fc4, suivi de 0-0, avec comme perspective de frapper la plus grande faiblesse de la position noire, le pion en f7, grâce à la colonne f semi-ouverte. La théorie a montré que si les noirs veulent conserver le pion gambité, ils sont obligés d'affaiblir leur aile-roi. Le désavantage du Gambit du Roi pour les blancs est qu'ils affaiblissent leur propre aile-roi, exposant celui-ci à la menace latente ...Dh4+ (ou ...Fe7–h4+). Avec un pion noir en f4, les blancs ne peuvent généralement répondre à l'échec par g3. De plus, si le roi est forcé de bouger, il perd le droit de roque.

Le Gambit du Roi est l'une des ouvertures dont la littérature est la plus ancienne : elle a été étudiée par Giulio Cesare Polerio, un joueur italien du XVIIème siècle. On la retrouve également dans un livre plus ancien de Luis Ramírez de Lucena.

Le Gambit du Roi était l'une des ouvertures les plus appréciées au XIX° siècle. Aujourd'hui, elle n'est que peu fréquemment employée par les maîtres, car les noirs peuvent obtenir un milieu de jeu correct en rendant le pion sacrifié pour consolider leur position. Il y a deux grands types de Gambits du Roi : le Gambit du Roi Accepté (GRA), où les noirs jouent 2…exf4, et le Gambit du Roi Refusé (GRR), où les noirs ne jouent pas 2…exf4.

 

Sommaire

 

Histoire

Le Gambit du Roi a été l'une des ouvertures les plus populaires durant plus de 300 ans, et elle a été jouée par nombre des plus forts joueurs (A noter, entre autres parties éblouissantes, l'Immortelle). Néanmoins, les vues des joueurs divergent à son sujet. François-André Danican Philidor (1726–95), le plus grand joueur et théoricien de son temps, écrivit que le Gambit du Roi menait à la nulle si les deux adversaires jouaient les meilleurs coups. Il émit le postulat qu'un gambit attaqué aussi bien qu'il est défendu n'était jamais décisif, que ce soit pour l'un ou l'autre des opposants." 150 ans plus tard, Siegbert Tarrasch, l'un des plus forts joueurs mondiaux fin XIX°-début XX°, déclarait que cette ouverture constituait "une erreur décisive" et écrivait que c'était "presque de la folie de jouer le Gambit du Roi." De même le champion du monde Bobby Fischer écrivit un article célèbre : "Bousillons le Gambit du Roi", dans lequel il déclarait : "D'après moi, jouer le Gambit du Roi, c'est se saborder. C'est une défaite forcée." Et proposait sa Défense Fischer (3...d6) pour réfutation. Graham Burgess, dans son livre The Mammoth Book of Chess, notait l'écart existant entre le Gambit du Roi et la théorie de l'accumulation de Wilhelm Steinitz. Steinitz avait avancé l'argument suivant : une attaque ne peut être justifié que lorsque le joueur a un avantage, et un avantage ne peut être obtenu qu'après que l'adversaire ait commis une erreur. Etant donné que 1...e5 ne semble pas être une bourde, les blancs ne devraient par conséquent pas lancer une attaque.

Aucune de ces déclarations, cependant, n'a pu réellement réfuter le Gambit du Roi. En 2012, Chessbase, avec la complicité de Vasik Rajlich – l'inventeur de Rybka— lança un poisson d'avril. Ils prétendaient avoir prouvé à 99.99999999% que le Gambit du Roi menait au mieux les blancs à la nulle. Rajlich déclara par la suite que, "si les capacités d'analyse doublaient tous les 18 mois lors du siècle qui vient, nous aurions les armes pour "résoudre" le Gambit du roi autour de 2120, à quelques décades près."

Le Gambit du Roi est très rarement joué de nos joueurs par les grands maîtres, et c'est encore plus vrai à top-niveau. Une poignée de grands maîtres l'utilisent toutefois, parmi lesquels Joseph Gallagher, Hikaru Nakamura, Nigel Short, et Alexei Fedorov. Elle faisait aussi partie de l'arsenal de David Bronstein, qui lui a, presque à lui seul, rendu sa respectabilité. Après lui, Boris Spassky a battu de forts joueurs en l'utilisant, incluant Bobby Fischer, Zsuzsa Polgar, et (lors d'une partie exceptionnelle) Bronstein lui-même. Au niveau "club", le livre de Gallagher Winning with the King's Gambit, est devenu très populaire, ce qui signifie que les amateurs peuvent être séduits par le Gambit du Roi.

 

Variantes

Il existe plusieurs variantes, que ce soit de l'accepté ou du décliné. Toutefois, on pense généralement qu'il vaut mieux accepter.

 

Gambit du Roi Accepté : 2...exf4

 

gambit roi


Comme nous l'avons dit plus haut, les noirs acceptent la plupart du temps, avec 2...exf4. Les blancs disposent alors de deux coups principaux : 3.Cf3, le Gambit du Cavalier Roi, est le plus courant, car il permet de développer le cavalier tout en empêchant 3...Dh4+; et 3.Fc4, le Gambit du Fou où les blancs se développent rapidement après la suite (souvent jouée au XIX° siècle) 3...Dh4+!? 4.Rf1 suivi de 5.Cf3, éloignant la dame en gagnant un temps. Toutefois, dans la pratique moderne, 3...Cf6 est joué beaucoup plus souvent. Il existe de nombreux autres troisièmes coups; voici quelques-uns des plus respectés :

D'autres coups ont aussi un nom, mais ils sont rarement joués.


Le Gambit du Cavalier Roi : 3.Cf3

Variante Classique : 3...g5

La variante Classique émerge après 3.Cf3 g5; les suites vues le plus souvent par le passé étaient 4.h4 (l'Attaque Paris), et 4.Fc4. Toutefois, récemment, de forts joueurs ont essayé 4.Cc3 (l'Attaque Quaade).

4.h4

Après 4.h4 g4, les blancs ont le choix entre 5.Cg5 et 5.Ce5. 5.Cg5, appelé Gambit Allgaier, avec l'intention de jouer 5...h6 6.Cxf7, est jugé douteux par la théorie moderne. Le coup 5.Ce5 est plus fort. On l'appelle Gambit Kieseritzky. Il s'agit d'un mouvement de nature plutôt positionnelle, popularisé par Lionel Kieseritzky dans les années 1840. Il fut employé avec grand succès par Wilhelm Steinitz, ainsi que par Boris Spassky, qui gagna face à Bobby Fischer une partie célèbre à Mar del Plata en 1960. D'ailleurs, cela convainquit Fischer de développer sa propre défense contre le Gambit du Roi (voir plus bas "Défense Fischer").

4.Fc4

Le très pointu Gambit Muzio se dessine par les mouvements 4.Fc4 g4 5.0-0 gxf3 6.Dxf3. Les blancs ont sacrifié un cavalier, mais ont trois pièces prêtent à fondre sur f7. Dans les échecs modernes, il est rare de voir une telle agressivité, mais les noirs doivent se montrer prudents et consolider leur position. Les noirs peuvent éviter le Muzio, en répondant 4…Fg7 et …h6 à 4.Fc4. La suite la plus précise est peut-être le Double-Muzio : 6...Df6 7.e5 Dxe5 8.Fxf7+!?, avec deux pièces de moins pour les blancs (en huit coups), mais avec une position que certains maîtres considèrent égale.

A noter deux lignes similaires qui peuvent se voir transposées dans le Muzio : le Gambit Ghulam Kassim, 4.Fc4 g4 5.d4, et le Gambit MacDonnell, 4.Fc4 g4 5.Cc3. Celles-ci sont généralement considérés inférieures au Muzio, qui a pour avantage de renforcer l'attaque blanche sur la colonne f.

Le Gambit Salvio, 4.Fc4 g4 5.Ce5 Dh4+ 6.Rf1, est réputé meilleur pour les noirs, à cause de la position exposée du roi blanc. Les noirs peuvent jouer la sécurité, avec 6...Ch6, ou contre-sacrifier avec 6...f3 or 6...Cc6.

A retenir : une alternative sûre à 4...g4 est 4...Fg7.

Becker Defence: 3...h6

L'idée de la défense Becker (3.Cf3 h6) est de créer une chaine de pions h6, g5, f4 pour défendre le pion f4 tout en évitant le Gambit Kieseritzky. Les blancs peuvent tenter 4.b3, même si la ligne principale est 4.d4 g5 (ECO C37) avec assez souvent une transposition dans des lignes de la variante Classique après 5.Fc4 Fg7 6.0-0 (ECO C38).

Défense Bonch–Osmolovsky : 3...Ce7

La défense Bonch–Osmolovsky n'est que peu vue. 3.Cf3 Ce7 fut joué par Mark Bluvshtein pour vaincre l'ancien finaliste du championnat du monde Nigel Short à Montreal en 2007, mais la théorie ne l'a jamais tenue en très haute estime.

Défense Cunningham : 3...Fe7

La défense Cunningham (3.Cf3 Fe7) menace un échec en h4 qui peut définitivement empêcher les blancs de roquer; de plus, si les blancs ne développent pas leur fou roi immédiatement, ils seront forcés de jouer Re2, ce qui aura pour effet d'enfermer leur fou. Un échantillon de ce que cela peut donner : 4. Cc3 Fh4+ 5. Re2 d5 6. Cxd5 Cf6 7. Cxf6+ Dxf6 8. d4 Fg4 9. Dd2. Les blancs ont une forte position au centre avec les pions en d4 et e4, tandis que, en compensation, les noirs vont s'appuyer sur la position très inconfortable du roi blanc.

gambit roi

Pour éviter d'avoir à jouer Re2, les blancs jouent très souvent 4. Fc4. Les noirs peuvent toujours répondre ...Fh4+, forçant 5.Rf1 (ou le Gambit Bertin - autrement nommé Gambit des Trois Pions - 5.g3 fxg3 6.0-0 gxh2+ 7.Rh1, comme on jouait au XIX° siècle). Au lieu de cela, dans la pratique moderne, il est d'usage pour les noirs de se développer simplement, par 4...Cf6 5.e5 Cg4, suite connue sous le nom de Cunningham Moderne.


Défense Schallopp : 3...Cf6

La Défense Schallop (3.Cf3 Cf6) – avec l'intention de poursuivre 4.e5 Ch5, pour s'accrocher au pion – est considérée quelque peu inférieure, et est rarement jouée de nos jours. Dans l'une de ses lignes, les blancs peuvent obtenir une attaque dévastatrice grâce à un sacrifice de tour : 4.e5 Ch5 5.d4 g5 6.h4 g4 7.Cg5 Cg3 8.Fc4! Cxh1 9.Fxf7+ Re7 10.Cc3 (visant un mat immédiat en d5, ou plus tard avec la dame en f6), et les noirs semblent condamnés.

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Défense Moderne : 3...d5

La Défense Moderne, ou Défense Abbazia, 3.Cf3 d5, reprend l'idée du Contre-Gambit Falkbeer (à vrai dire, on l'obtient par transposition, par exemple 2.f4 d5 3.exd5 exf4). Les noirs concentrent leur attention sur l'activité de leurs pièces et l'initiative, plutôt que sur la conservation du pion gambité. Plusieurs publications l'ont recommandé comme moyen d'obtenir l'égalité facilement, même si les blancs conservent le léger avantage donné par le pion central supplémentaire et l'activité de leurs pièces. Si les blancs capturent (4.exd5), alors les noirs peuvent jouent 4...Cf6 ou recapturer par 4...Dxd5 : on est alors dans la variante Scandinave du Gambit Dame Accepté.

Défense Fischer : 3...d6

"La réfutation d'un gambit commence par son acceptation. D'après moi, jouer le Gambit du Roi, c'est se saborder. C'est une défaite forcée." – B. Fischer, "Bousillons le Gambit du Roi"

La Défense Fischer, 3.Cf3 d6, doit son nom à Bobby Fischer (elle a gardé son nom bien qu'elle eût été connue auparavant) qui, après avoir été battu par Boris Spassky dans un Gambit Kieseritzky dans le tournoi de Mar del Plata en 1960, décida d'en proposer une réfutation.  L'année suivante, l'American Chess Quarterly publia l'analyse de Fischer de 3...d6 ("un coup d'attente bien classe").

L'idée de Fischer est la suivante : après 4.d4 g5 5.h4 g4, les blancs ne peuvent poursuivre par 6.Ce5, comme dans le Gambit Kieseritzky, et 6.Cg5 est mauvais à cause de 6...f6! qui prend le cavalier au piège. Seule option restante : 6.Cg1, et après six coups, aucun des opposants n'a développé de pièce.

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La seule alternative à 4.d4 est 4.Fc4, mais elle est considérée inférieure.

3...Cc6

Joe Gallagher écrit que 3.Cf3 Cc6 "n'a jamais réellement été adopté par les joueurs, probablement parce qu'il ne résout en rien les problèmes à court terme des noirs". Comme la Défense Fischer, il s'agit d'un coup d'attente, dont l'évident désavantage est que le cavalier en c6 sera plus tard dans l'ouverture une cible pour le pion d. 

 

Gambit du Roi Refusé

Les noirs peuvent refuser le pion offert en sacrifice, ou proposer eux-mêmes un contre-gambit.

Contre-gambit Falkbeer : 2...d5

Le contre-gambit Falkbeer tient son nom du Germanophone Austro-Hongrois du XIX° siècle Ernst Falkbeer. Voici comment il se déroule : 1.e4 e5 2.f4 d5 3.exd5 e4; les noirs sacrifient un pion et en retour ont un développement rapide et facile. Autrefois, on le pensait bon pour les noirs et de bons résultats étaient obtenus par ceux qui l'employaient. Puis il perdit les faveurs des joueurs après les années 1930, car on s'aperçut que les blancs prenaient l'avantage avec la réponse 4.d3!

Il existe une interprétation plus moderne du Falkbeer : 2...d5 3.exd5 c6!?, prôné par Aron Nimzowitsch. Les noirs font fi des pions et activent leurs pièces très tôt. Les blancs ont une meilleure structure de pions et pensent pouvoir prétendre à une meilleure fin de partie. La ligne principale 4.Cc3 exf4 5.Cf3 Fd6 6.d4 Ce7 7.dxc6 Cbxc6 donne des positions de même type que celles de la variante Moderne du gambit accepté.

Défense Classique : 2...Fc5

2...Fc5, le Gambit Roi Refusé "Classique" est une manière commune de refuser le sacrifice. Le fou empêche les blancs de roquer, est est gênant à tel point que les blancs utilisent souvent deux temps pour l'éliminer, par Cc3-a4, pour l'échanger en c5 ou b6, et ainsi roquer tranquillement. A noter aussi un piège d'ouverture pour les débutants : si les blancs continuent avec 3.fxe5?? les noirs poursuivent par 3...Dh4+, et alors soit la tour est perdue (4.g3 Dxe4+, prenant en fourchette tour et roi), soit le roi blanc est maté (4.Re2 Dxe4#). On retrouve fréquemment cette ligne par transposition à partir de la Partie Viennoise ou de l'Ouverture du Fou, lorsque les blancs jouent f4 avant Cf3.

Autres second coups

D'autres options sont possibles dans le Gambit Roi Refusé, bien qu'inhabituelles, comme par exemple le Contre-gambit Adelaide 2...Cc6 3.Cf3 f5, prôné par Tony Miles; 2...d6, avec, après 3.Cf3, une transposition dans la Défense Fischer via le meilleur coup 3...exf4 (toutefois, 2...d6 invite les blancs à plutôt jouer 3.d4); et 2...Cf6 3.fxe5 Cxe4 4.Cf3 Cg5! 5.d4 Cxf3+ 6.Dxf3 Dh4+ 7.Df2 Dxf2+ 8.Rxf2 avec léger avantage de fin de partie (cette suite apparait dans le match entre Bobby Fischer et Robert Wade à Vinkovci en 1968). Le gourmand 2...Df6 (connu sous le nom de Variante Norwalde), préparant 3...Dxf4, a mauvaise réputation. De même que la Défense Keen : 2...Dh4+ 3.g3 De7 et la Défense Mafia : 1.e4 e5 2.f4 c5.

Contre-gambit Pantelidakis : 2...f5

Parmi les plus vieux contre-sacrifices connus du Gambit roi refusé, parlons du contre-gambit Pantelidakis : 1.e4 e5 2.f4 f5?!. Il apparait dans une partie de 1625 dans laquelle Gioachino Greco gagna avec les noirs. Vincenz Hruby, lui aussi, l'employa face à Mikhail Chigorin en 1882. Néanmoins, il s'agit d'un coup relativement mauvais, car 3.exf5, avec la menace Dh5+ offre une bonne position aux blancs. Cette variante doit son nom à l'anecdote suivante : le grand maître Larry Evans répondit à une question à son sujet posée par Peter Pantelidakis, de Chicago, dans l'une de ses colonnes dans Chess Life and Review.

 

ECO

L'Encyclopédie des Ouvertures d'Echecs a 10 codes pour le Gambit du Roi, de C30 à C39.