Selon ChessBase, en niveau maître, sur les vingt ouvertures possibles, 1.f4 se place en sixième position en termes de popularité. La Bird est bien moins populaire que son reflet, l’ouverture anglaise (1.c4), essentiellement parce qu’1.f4 affaiblit légèrement la position du roi blanc. Parmi les grands maîtres qui l’ont utilisée assez régulièrement, citons Bent Larsen, Lars Karlsson et Mickey Gurevich.
1 - Ligne officielle
La réponse la plus fréquente des noirs est 1...d5, et la partie se transforme en défense hollandaise inversée (1.d4 f5). Les blancs peuvent alors :
Fianchetter leur fou-roi : Cf3, g3, Fg2, puis petit-roquer, c’est typique de la Hollandaise Leningrad inversée
Se positionner en stonewall : pions en d4, e3, et f4, et tenter une attaque sur l’aile-roi
Fianchetter leur fou-dame pour affermir un peu plus leur emprise sur la case e5.
Ils peuvent enfin, s’inspirant de la variante Ilyin-Zhenevsky de la défense Hollandaise, jouer e3, Fe2, 0-0, d3 et essayer de réussir la poussée e3-e4 (il existe diverses façons d’y parvenir, par exemple : Ce5, Ff3, De2 et alors seulement e3-e4, ou bien, plus simplement, Cc3 suivi d’e4).
2 – Le Gambit From
Les noirs ont une option très subtile : 1...e5!?, le Gambit From, du joueur Danois Severin From (1828–1895). Après 1…e5, les blancs peuvent transposer dans un Gambit du roi avec 2.e4. S’ils préfèrent la Bird, la partie peut se poursuivre ainsi : 2.fxe5 d6 (2...Cc6 est aussi jouable; auquel cas, recommande le MI Timothy Taylor, dans son livre sur la Bird publié en 2005, il faut répondre 3.Cc3! Cxe5 4.e4, dans l’optique de 5.d4, plutôt que 3.Cf3?! g5!, qui offre aux noirs une position assez bonne) 3.exd6 Fxd6. Ensuite, les blancs doivent jouer 4.Cf3 (et si 4...g5, soit 5.g3 g4 6.Ch4, soit 5.d4 g4 6.Ce5), et surtout pas 4.Cc3?? Dh4+ 5.g3 Dxg3+ 5.hxg3 Fxg3#. 4...Cf6, menaçant 5...Cxg4 et 6...Cxh2!, est possible aussi. Si les blancs commettent des erreurs, l’attaque noire peut s’avérer dévastatrice. Taylor considère que celle-ci a en fait peu de chances d’aboutir, mais, à vrai dire, les blancs doivent jouer avec la plus grande précision s’ils veulent annihilier les chances noires.
3 – Le Gambit Hobbs
Il s’agit d’une autre réponse agressive, bien que plus rare : 1...g5?!. La partie se poursuit habituellement comme ceci : 2.fxg5 h6, en quelque sorte, le reflet du Gambit Benko. Les blancs peuvent tout simplement rendre le pion, par 3.g6, laissant affaiblie l’aile-roi noire après 3...fxg6. Le Gambit Hobbs-Zilbermints, 1...h6 préparant 2...g5 est encore plus facile à jouer pour les blancs : 2. e4 g5 3. d4!
4 – Autres réponses
Le flexible 1...Cf6 s’est avéré possible à l’usage. Si les blancs poursuivent 2.b3?! (2.Cf3 est plus sûr), 2...d6! 3.Fb2 (ou 3.Cf3 e5! 4.fxe5 dex5 5.Cxe5?? Dd4!) e5!, le MI Michael Brooks a exposé l’idée d’une sorte de Gambit From Différé, qui pourrait être dangereux pour les blancs, par exemple, si : 4.fxe5 dxe5 5.Fxe5 Cg4! 6.Fb2 (6.Fg3 subit le même sort) Fd6!, les blancs sont plongés dans le trouble, car 7.Cf3 Cxh2! menace 8...Fg3#.
1...g6 est populaire également : un genre de Défense Moderne, transposable dans une défense Hollandaise inversée (si les noirs jouent ...d5 et ...c5), ou dans une Défense Sicilienne (si les blancs jouent e4 et les noirs ...c5). Les noirs interdisent de cette manière aux blancs de jouer sur la diagonale a1-h8. 1...c5 est une solution raisonnable aussi, avec l’espoir d’une transposition dans le Gambit Tal, variante de la Défense Sicilienne plutôt favorable aux noirs, après 2.e4 d5! 3.exd5 (3.Cc3, la variante poétiquement appellée « Toilette », est possible aussi) Cf6, mais les blancs ne vont pas nécessairement chercher à prendre le contrôle si vite, et peuvent construire plus lentement, avec 2.Cf3, suivi de g3, Fg2, d3 et, éventuellement, plus tard, d’e4.
Le contretemps 1...b6!? est célèbre aussi, et repose sur des bases plus sûres que lorsqu’il est joué après 1.e4 ou 1.d4, puisqu’1.f4 n’aide pas au développement blanc, et affaiblit de plus la diagonale a8-h1, étant donné qu’il rend impossible le coup f3 pour soutenir les pions centraux. La partie va souvent se poursuivre de cette façon : 2.e4 Fb7 3.d3. De même, 1...b5!?, une des formes de la Défense Polonaise, est possible aussi. Après le naturel 2.e4 Fb7, les blancs ne disposent d’aucune solution pour protéger e4 tout en continuant à attaquer b5, car 3.Cc3? b4 4.Cd5 e6 gagne un pion.
Martin Appleberry a tenté un autre contretemps : 1...Ch6!? avec l’idée de répondre à 2. b3 par 2...e5, un Gambit From Différé, et de répondre à 2.e4 par 2...d5! Toutefois, 2.Cf3 permet d’éviter ces deux lignes.
Si les noirs choisissent la réponse symétrique 1...f5, la suite blanche la plus agressive est 2.e4, menant éventuellement à un Gambit Suisse : 2...fxe4 3.Cc3 Cf6 4.g4. Ce gambit doit son nom à Aleksander Wagner (1868–1942), un joueur d’échecs polonais (et analyste en ouvertures) qui le présenta dans la partie par correspondance suisse Wagner–Kostin, 1910–1911.